Dispositif fiscal français

Jacques Mézard

Qui est Jacques Mézard et quelles ont été ses positions politiques en tant que sénateur du Cantal ? Comment son secrétaire d’État viendra-t-il influencer ses décisions ? Que fera le nouveau ministre en charge du logement des dispositifs favorables aux investisseurs tels que la loi Pinel ? Jacques Mézard est-il un fonctionnaire d’État fiable en regard de la moralisation de la vie politique ?

Qui est Jacques Mézard ?

Alors qu’il s’est premièrement vu attribuer la responsabilité du ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation, Jacques Mézard est finalement placé à la Cohésion des Territoires en raison de l’affaire “Richard Ferrand”.

Homme politique français, Jacques Mézard est membre du parti radical de gauche. Il devient successivement conseiller municipal d’Aurillac (sa ville natale), président de la Communauté d’agglomération du bassin d’Aurillac puis sénateur du Cantal - pendant 9 ans - avant de rejoindre le gouvernement Macron.

Soutien du mouvement “En marche” au cours de l’élection présidentielle de 2017, Jacques Mézard est avocat de formation, réputé pour ses prises de position en faveur de l’accès au logement et de la rénovation urbaine, notamment au sein du groupe sénatorial “Rassemblement démocratique et social européen” (RDSE).

Les années RDSE (2008-2017)

En 2013, le RDSE organise une séance de travail parlementaire autour d’un “projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové”. À cette occasion, Jacques Mézard (alors sénateur du Cantal) dresse un bilan sombre en matière de politique du logement :

  • hausse des loyers et des prix du logement,
  • réticence des propriétaires,
  • demande exponentielle de logements sociaux,
  • ineffectivité du droit au logement opposable,
  • manque de dignité de l’habitat,
  • dégradation des copropriétés.

Dénonciation du manque de logements

Pour Jacques Mézard, les problématiques énumérées sont majoritairement liées à une insuffisance du nombre de logements sur le territoire français. Il relève également la hausse des prix de la construction en France entre 2000 et 2011 (+51%) alors portée à un niveau supérieur à la moyenne européenne.

Défense de l’égalité des territoires

Par ailleurs, au cours des discussions générales avec le groupe sénatorial, Jacques Mézard manifeste son attachement à l’égalité des territoires.

En effet, l’actuel ministre de la Cohésion des Territoires dénonce à l’époque une “fracture territoriale aggravée”, soulignant que l’État participe à la concentration des habitants dans des zones déjà “tendues” et, par là même, à la désertification de territoires, qui laisse à la population un sentiment d’abandon.

Accélération des projets de construction

Le 29 mai 2013, Jacques Mézard évoque au cours d’une réunion parlementaire, la nécessité de lever certains obstacles administratifs, législatifs et réglementaires afin de permettre l’accélération de projets de construction. Dans le même ordre d’idée, M. Mézard suggère également de “redonner confiance à ceux qui peuvent construire” et particulièrement, de conforter l’action des bailleurs sociaux, des promoteurs et des constructeurs privés.

Aide au financement des logements étudiants

En séance au Sénat, le 6 novembre 2014, Jacques Mézard questionne le logement étudiant au sein des antennes universitaires “délocalisées”. Il demande alors une clarification des compétences des nouvelles régions.

Ces interventions sénatoriales de Jacques Mézard démontrent que son intérêt pour les questions politiques liées au logement et à l’habitat n’est pas récent.

De la loi Pinel à la “loi Mézard” : grand écart idéologique ?

L’arrivée au gouvernement d’un ancien membre du parti radical de gauche pose question concernant la survie des dispositifs d’incitation fiscale en place.

Loi Mézard

Alors que la loi promulguée par Sylvia Pinel propose de favoriser les contribuables qui investissent dans un logement neuf, comment Jacques Mézard perçoit-il l’effort de construction sur le territoire français ?

“On n’a pas, dans notre pays, anticipé les évolutions démographiques et sociétales” - Jacques Mézard le 22 octobre 2013 - Discussions générales du Rassemblement démocratique et social européen.

Ses prises de parole publiques donnent à penser que l’homme est conscient de la nécessité de mettre en cohérence la politique en matière de construction de logements avec l’augmentation de la population. Dans les faits, cela pourrait se traduire par un renfort de la création de logements et particulièrement par des mesures incitatives dès la construction : aide aux bailleurs, aux promoteurs, aux constructeurs. Ce soutien ne sera pas nécessairement financier mais pourrait se traduire par une levée des barrières réglementaires qui freinent l’initiative de construction.

D’ailleurs, le syndicat national des aménageurs lotisseurs (SNAL) dit voir d’un bon œil la nomination de Jacques Mézard.

La présidente du SNAL - Pascale Poirot - compte sur l’expérience de cet élu de longue date “ [...] pour appréhender le territoire dans toute sa diversité et développer une vision large et pragmatique en faveur d’une politique du logement garante de la cohésion entre les bassins métropolitains, périurbains et ruraux ”.

En effet, certains professionnels de l’immobilier et de l’habitat ont pu reprocher à Richard Ferrand de concentrer la politique du logement sur les seules métropoles. Or, l’organisation professionnelle consacrée à la représentation des aménageurs défend un plan de réformes qui bénéficierait à tous les territoires. Pour autant, cela ne signifie pas pour le SNAL qu’il faut renoncer à prioriser la construction en secteur aménagé. Le syndicat insiste simplement sur sa volonté de former un ministère qui sache construire en préservant l’âme de chaque territoire. C’est pourquoi, le syndicat salue l’arrivée au gouvernement d’un homme qui semble maîtriser les rouages de chaque échelle géographique.

Du côté des investisseurs, la vision politique de Jacques Mézard pourrait donner lieu à une évolution majeure de la loi Pinel :

  • zonage d’éligibilité à la fois renforcée en “zone tendue” (où la demande est supérieure à l’offre de logements) et élargi aux zones détendues : ces décisions que l’on juge parfois opposées ne sont pourtant pas incompatibles,
  • contrainte de réduction du prix de vente des biens neufs,
  • libération du foncier au profit des primo-accédants.

Zonage Mézard

Pour construire en accord avec les évolutions démographiques, il se pourrait que le ministère crée une zone Mézard D en plus des zones Pinel A bis, A, B1, B2 et C. Cela permettrait d’affiner les besoins en matière de logement en abaissant davantage les loyers au mètre carré dans les zones détendues. La potentielle zone D imposerait un loyer de 7€ du mètre carré, mesure incitative à la location. Pour avoir l’effet escompté, cette mesure devrait s’accompagner d’un renforcement des transports en commun dans les zones éloignées des métropoles, pour permettre aux actifs de rejoindre les grands pôles d’activités.

Abaissement des prix du neuf

D’autre part, si la quantité de logements neufs s’adapte à la demande, alors le prix d’un bien dépend des techniques de production (coût des nouvelles réglementations thermiques, acoustiques et électriques) et / ou des subventions de la demande (baisse des taux d’intérêt nominaux, allongement de la durée d’emprunt, hausse des revenus, innovation dans le secteur). Ainsi, Jacques Mézard pourrait mettre en place des mesures à destination des banques afin d’éviter que les offres d’emprunt ne soient incitatives au point d’engager trop de contractions de crédits (parfois difficilement remboursables par les particuliers). Par voie de conséquence, cette mesure pourrait aider à faire baisser le prix de vente des biens sur le marché du neuf (décroissance de la demande de logements neufs qui engendre un abaissement des prix de vente).

Libération du foncier à destination des primo-accédants

Enfin, en tant que ministre animé par les valeurs de la gauche, Jacques Mézard pourrait accélérer la libération du foncier afin que l’accession à la propriété soit facilitée. Si les contribuables propriétaires tendent à ralentir les mises en chantier par le recours à des procédures judiciaires (volonté de ne pas soudainement être entourés d’immeubles), de nouvelles réformes pourraient contribuer à limiter les possibilités de recours en justice dans le cadre de la construction de logements. De même, la politique de Jacques Mézard devrait aller vers un renforcement des OIN ou “opérations d’intérêt national” : elles permettent à l’État de se substituer aux maires dans la délivrance des permis de construire (et ce, pour une centaine de villes françaises).

Julien Denormandie, son secrétaire d’État

Pour mener à bien sa mission au sein du ministère en charge des questions liées au logement, Jacques Mézard pourra compter sur le soutien de celui qui a été nommé secrétaire d’état : Julien Denormandie.

En dépit de son jeune âge (37 ans), l’homme est entré en politique il y a déjà 13 ans, en détachement à la direction des relations économiques extérieures du ministère de l’Économie et des finances.

Ingénieur des eaux et des forêts, titulaire d’un Master Business Administration en Économie (MBA), Julien Denormandie travaille durant deux années à l’ambassade de France au Caire en tant que conseiller économique puis comme conseiller de Nicole Bricq et Pierre Moscovici au gouvernement, en 2012.

Pour l’heure, l’on ne connaît pas les aspirations et les idées du jeune secrétaire d’État, toutefois, l’on peut parier qu’en tant qu’ingénieur agronome et du génie rural, il sera partisan d’un aménagement du territoire qui préserve les espaces et les ressources naturelles. Sa formation en économie nuance cette vision et laisse présager une attention également tournée vers le développement des territoires en termes d’accès à l’emploi et au numérique.

En somme, Julien Denormandie devrait pouvoir partager la vision de Jacques Mézard d’une politique qui désenclave les territoires oubliés.

Jacques Mézard, figure d’exemple de la moralisation de la vie politique

Alors que la polémique résonne autour de Richard Ferrand concernant une affaire immobilière surgit de son passé de dirigeant des Mutuelles de Bretagne, Jacques Mézard se présente comme un parangon de probité.

Tour à tour Membre du comité de déontologie parlementaire du Sénat et Rapporteur de la commission d’enquête sur le bilan et le contrôle de la création, de l’organisation, de l’activité et de la gestion des autorités administratives indépendantes, Jacques Mézard est notamment l’auteur de la proposition de loi sur le contrôle des autorités administratives indépendantes comme le CSA ou l’Hadopi, autorités pour lesquelles il a proposé une harmonisation des règles d’application.

Par ailleurs, le ministre de la Cohésion des Territoires est Chevalier de l’ordre du mérite depuis 1997, ce qui peut témoigner d’une certaine capacité à servir la nation

En somme

Pour l’heure, les réseaux sociaux de Jacques Mézard ainsi que les pages officielles qui lui sont dédiées restent incomplètes voire vides. L’on sait seulement que la sensibilité politique du ministre est grandement orientée vers le fait de renforcer l’attractivité des villes qui ne bénéficient pas de l’élan d’une métropole. Il reste à découvrir si la question des “zones tendues” saura attiser sa considération. Emmanuel Macron devrait faire entendre sa voix au sein du ministère de la Cohésion des Territoires, sur cette question pour laquelle il a manifesté une position tranchée.